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ESCP Vilnius 2023 – Jour 1, mercredi 27 septembre 2023

ESCP 2023

Vos reporters, Alix Portal, Maxime Collard, Farouk Drissi, Léon Maggiori, François Pigot, Diane Mège, Nadia Fathallah, Charlotte Favreau-Weltzer ont suivi avec assiduité cette première journée de l’ESCP 2023. Journée très riche, en voici quelques brèves en direct de Vilnius rien que pour vous.

Cathédrale de Vilnius
Cathédrale de Vilnius

A decreased volume of mesorectal tissue in patients with rectal prolapse: the chicken-or egg dilemma in the pathogenic mechanism?

Un mésorectum peu épais chez les patients avec un prolapsus rectal : la poule ou l’œuf dans la pathogénie ?

Marra A.A., Picciarellei F., Zerunian M., de Santis D., Caruso D., Laghi A., Ratto C. Rome. (poster)

Mesure de la surface du mésorectum sur des coupes horizontales en IRM, rectum rempli par une quantité similaire de gel. Quarante femmes avec prolapsus rectal comparés à 40 patients avec un cancer rectal intramural. Pas de différence pour les dimensions de la cavité pelvienne osseuse mesurée par les diamètres antéropostérieur et latéral, mais de façon très significative une plus grande surface occupée par la lumière rectum et une plus petite surface de mésorectum chez les patients avec prolapsus. Cette différence morphologique constatée chez les patientes avec un prolapsus rectal ouvre des pistes de réflexion : conséquence ou cause ?

High and low take-off external prolapse phenotypes can be characterised preoperatively on defaecation proctography.

Prolapsus démarrant du haut ou du bas rectum, deux phénotypes identifiés en Défécographie.

Cooper E., Singh S., Yates C., Hodgkinson J., Cunningham C., Lindsey I. Oxford. (poster)

Cette notion de prolapsus du bas ou du haut rectum est parfois entendue dans les discussions, mais elle est peu étudiée dans la littérature. Peut-on vraiment identifier deux types différents de prolapsus rectaux selon ce critère ? Cette caractéristique a été évaluée sur 88 défécographies de patients avec un prolapsus rectal extériorisé. La majorité (92%) étaient des femmes. Cinquante-trois (60%) patients avaient un prolapsus du haut rectum. La chute de la jonction recto-sigmoïdienne était significativement plus importante dans le premier groupe. Les auteurs comparent les prolapsus du bas rectum à une hernie de la paroi à travers l’orifice anal et les prolapsus du haut rectum à un défaut de fixation de l’ensemble du rectum et de la charnière par trouble du tissu conjonctif. D’après les auteurs une approche chirurgicale par voie abdominale est donc à préférer en cas de prolapsus du haut rectum, et une voie d’abord périnéale est possible pour les prolapsus limités au bas rectum. De plus cette caractéristique pourrait ouvrir des pistes sur la physiopathologie de ce prolapsus et éventuellement individualiser un facteur de risque de récidive.

The role of defaecation proctography in characterising which quadrant of the rectum acts as the lead point and its surgical implications.

Quelle face du rectum est responsable du prolapsus rectal en défécographie et ses implications chirurgicales

Cooper E., Yates C., Cunningham C., Lindsey I. Oxford. (poster)

Cette équipe pense qu’en plus du départ haut ou bas d’un prolapsus rectal, l’engagement prédominant d’une face ou d’une autre pourrait avoir des implications sur le choix d’une technique chirurgicale.  Sur les mêmes 88 défécographies la prédominance antérieure ou postérieure du prolapsus a été mesurée. L’intussuscpetion était majoritairement circonférentielle, 62% en cas de prolapsus du haut rectum et 54% en cas de prolapsus bas. Les prolapsus antérieurs ou postérieurs se retrouvaient en fréquences égales, et ceci de façon similaire dans les prolapsus hauts et bas. D’après les auteurs, la rectopexie antérieure est à préférer en cas de prolapsus du haut rectum (cf. revue du poster précédent) et aussi en cas de prolapsus bas prédominant sur la face antérieure. Les prolapsus prédominants sur la face postérieure seraient plus à même d’être opérés par rectopexie postérieure.

Recurrence rate after surgical and local resection of T1 rectal cancer

Récidive après traitement chirurgical ou résection locale de cancers T1 du rectum.

Nilsson E., Arvidsson L., Ronnow C.F., Thorlacius H. Malmo, Suède.  (poster)

Cette cohorte nationale rétrospective a inclus 2 176 patients entre 2009 et 2021. 1 103 étaient analysables (suivi disponible, M0, pas de traitement complémentaire, dossier complet). Les taux de récidive locale ont été comparés entre résection chirurgicale, résection transanale (TEM) et exérèse endoscopique. Après un suivi médian de 60 mois, les taux de récidive ont été : 5,1% pour les 550 résections chirurgicales, 11,3% pour les 213 TEM, 9,7% pour les 340 résections endoscopiques. Les courbes de survie sans récidive ont montré des résultats significativement moins bons pour les deux techniques locales vs la chirurgie radicale (RR 2,41 pour la TEM et 2,76 pour l’endoscopie). Les facteurs de risque de récidive étaient une résection R1 ou Rx pour la chirurgie et une invasion sm3 pour les techniques locales.

T1 colorectal cancer diagnosis and treatment controversies

Difficultés pour le diagnostic et traitement des cancers T1 colo-rectaux

Jakubauskas M., Stulpinas R., Poskus T., Poskus E. Vilnius. (poster)

Ce travail issu du pays hôte de l’ESCP a consisté à colliger les patients ayant bénéficié de la résection endoscopique d’un polype d’au moins 2 cm de stade T1 après analyse de la pièce d’exérèse entre 2017 et 2020. Sur les 100 patients, 22 ont eu une résection chirurgicale complémentaire. Douze avaient un résidu tumoral et un une localisation ganglionnaire. L’analyse de la littérature leur a permis les critères permettant de discuter un geste complémentaire après résection endoscopique : localisation de la tumeur, pièce de résection fragmentée, forme du polype, grade de différenciation, profondeur d’invasion, marge, budding, foyers peu différenciés, statut MMR/MSI. En pratique, ces données étaient incomplètes dans la majorité des dossiers évalués. Ils proposent d’instituer une grande rigueur dans leur recueil et l’aide d’une intelligence artificielle pour les analyser et décider de la nécessité d’un éventuel traitement complémentaire.

CHETTAH Routine sterile glove and instrument change at the time of abdominal wound closure to prevent surgical site infection: a pragmatic, cluster-randomised trial in seven LMICs

CHETTAH Changement systématique de gants et d’instrument lors du temps de fermeture de la paroi en prévention des infections du site opératoire : une étude randomisée pragmatique dans 7 centres.

Lawani I. (communication orale)

Ismail Lawani, chirurgien béninois donc francophone, a conduit cette étude multicentrique internationale, intercontinentale (Inde, Afrique, Amérique centrale). En 2017 il a constaté l’absence de recommandation officielle. Son étude a inclus 986 patients opérés majoritairement en chirurgie ouverte (98%) dans 87 hôpitaux. Le critère de jugement était le taux d’infection du site opératoire dans les 30 jours. Les deux groupes, avec ou sans changement de gants et d’instruments au temps de fermeture étaient comparables notamment en termes de diabète, HIV, tabac. Les taux d’infection étaient diminués avec un RR de 0,87 (18,9 vs 16,1%). Ceci quel que soit le sous-groupe, notamment chirurgie en urgence vs chirurgie réglée. Cette stratégie serait économiquement pertinente, point important dans les pays concernés où le patient règle en général lui-même ses frais médicaux.

CREST 2 – Uncovered versus covered endoluminal stenting in the acute management of obstructing colorectal cancer in the palliative setting – a randomised trial

CREST 2 – Stent endoluminal découvert versus couvert dans la gestion aiguë du cancer colorectal obstructif en situation palliative – un essai randomisé

Nicola Faernhead, Nuffield Health Cambridge Hospital, Angleterre (communication orale)

Des chercheurs britanniques ont dévoilé en avant-première les résultats de l’essai clinique CREST 2, une étude randomisée comparant l’utilisation de stents couverts et de stents non couverts dans le traitement des obstructions colorectales liées au cancer. Alors que l’utilisation de stents est souvent critiquée dans la prise en charge des obstructions non palliatives du cancer du côlon en raison des risques de perforation tumorale, cette étude se concentre spécifiquement sur les patients à un stade palliatif de la maladie. L’objectif principal de l’étude était d’évaluer la perméabilité des stents après 6 mois et la qualité de vie des patients après 3 mois, en comparant les deux types de stents. L’étude a impliqué 377 patients répartis de manière égale entre les deux groupes, dans le cadre d’un essai multicentrique visant à démontrer la supériorité d’un traitement sur l’autre. Les patients atteints de cancer du bas rectum ont été exclus de l’étude, mais toutes les autres localisations colorectales ont été prises en considération. Finalement, aucune différence significative n’a été observée entre les deux groupes en ce qui concerne la qualité de vie après 3 mois, et la perméabilité des stents était identique à 6 mois après leur mise en place. Face à cette absence de différence notable, une étude médico-économique en attente déterminera la meilleure option en cas de différences significatives, en privilégiant l’option la plus économique. Il est à noter que la réussite technique de la pose des stents a été de 87%, bien que le taux de perforation ait atteint 6%. Ces données pourraient renforcer l’idée de proposer en première intention une stomie de protection dans les cas potentiellement curatifs.

AIN / Anal cancer

Sarah Mills, UK (communication orale)

Pour une fois les femmes ne sont pas les laissées pour compte dans le dépistage de la dysplasie anale ! Sarah Mills (UK) a fait une présentation limpide et inspirante sur la prise en charge diagnostique et thérapeutique de la dysplasie et des cancers de l’anus.

Ils ont ouvert le « Chelsea ano genital neoplasia service », concept novateur qui offre aux patients une prise en charge spécialisée, à la pointe et surtout pluridisciplinaire : dermatologues, gynécologues, proctologues, infectiologues et sexologues.

La gestion des lésions dysplasiques est ainsi standardisée et optimisée, les lésions génitales et anales sont prises en charge en un temps et au même endroit (d’où une diminution du nombre de consultations et de passage au bloc opératoire). Cette structure permet une meilleure éducation thérapeutique des patientes et ainsi un dépistage précoce d’éventuelles lésions anales chez des femmes suivies pour dysplasie génitale.

Ils proposent un protocole de dépistage par test HPV16 anal de la population féminine, assez lointain de nos recommandations françaises : toutes les femmes après 65 ans, et dès 50 ans en cas de facteurs de risques (test HPV16+ au frottis cervico vaginal, antécédent de dysplasie de haut grade ou cancer génital, immunosuppression).

De plus une grande part de leur activité est consacrée à la recherche, notamment à l’identification de biomarqueurs prédictifs de la progression de la dysplasie vers le cancer.

Pour en savoir plus : https://youtu.be/es03zRBcghQ?si=xBwmx7lT8xN508kL

Amis gynécologues, unissons-nous !

GRECCAR12 – Organ preservation in rectal cancer treated by induction chemotherapy followed by radiochemotherapy versus radiochemotherapy alone – a randomised phase III trial

GRECCAR12 – Préservation d’organe dans le traitement du cancer du rectum par une chimiothérapie d’induction suivie d’une radiochimiothérapie par rapport à une radiochimiothérapie seule – un essai randomisé de phase III.

Benjamin Fernandez nous présente les résultats de l’essai GRECCAR12. A ce jour nous ne pouvions pas faire la part des choses entre le GRECCAR 2 sur la préservation d’organe et le traitement néoadjuvant total qui, depuis PRODIGE 23, est maintenant considéré comme le traitement de référence. Un grand merci à cette étude française qui tranche le débat…

Article proposé en collaboration avec

La Revue – Colo-proctologie
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