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LOSA : conséquences à moyen-long terme

Les principales conséquences à moyen et long terme des lésions obstétricales de l’anus (LOSA) sont l’incontinence anale, la dyspareunie et la fistule rectovaginale.  

L’incontinence anale

Quel est le risque d’incontinence anale après LOSA ?

Le risque de survenue d’une incontinence anale chez les patientes ayant eu une LOSA évolue au cours du temps : il serait multiplié par 7 à un an de l’accouchement (van brummen) mais ce sur-risque diminue nettement à long terme (faltin). Dans une revue de littérature récente (Viannay), 60% des patientes ayant eu une LOSA souffrirait d’une incontinence anale 15 à 25 ans après. Le risque d’incontinence anale serait associé à la sévérité de la déchirure, en termes d’étendue et de d’atteinte combinée des 2 sphincters. Ces chiffres sont cependant à considérer avec prudence pour plusieurs raisons. Tous les facteurs associés à l’incontinence anale ne sont pas toujours pris en compte dans ces études épidémiologiques. Des facteurs d’incontinence anale peuvent se surajouter mais il n’est pas toujours simple de les identifier et de les recueillir dans le suivi. Par ailleurs, une rupture sphinctérienne n’implique pas toujours une dysfonction anale et la physiopathologie de l’incontinence anale ne repose pas uniquement sur une dysfonction anale. En effet, la physiopathologie de l’incontinence anale est complexe et souvent, plusieurs facteurs sont intriqués pour expliquer l’incontinence anale. Plusieurs données vont dans ce sens : (i) le risque d’incontinence anale à long terme attribuable à la LOSA serait faible (6% à 18 ans) (faltin) ; (ii) les facteurs de risque d’incontinence fécale persistant après LOSA sont l’accouchement par forceps, l’âge maternel élevé, et l’ethnie asiatique-indienne (maccarthur)  (iii) l’accouchement par césarienne ne semble pas protéger de l’incontinence fécale après 50 ans (maccarthur).

Après une première LOSA, un deuxième accouchement n’augmenterait pas le risque d’incontinence anale ou n’entrainerait pas d’aggravation de l’incontinence anale (webb et al). En cas de récidive de LOSA, le risque d’incontinence anale serait multiplié par 2 ( Jango et al).  

  • Le risque d’incontinence anale après LOSA est élevé au début et diminue au cours du temps. Il est important de délivrer cette information aux patientes ayant eu une LOSA
  • Il est difficile de déterminer le rôle exact des LOSA dans la survenue de l’incontinence anale en raison d’une physiopathologie complexe et multifactorielle

Prévenir et prendre en charge l’incontinence anale après LOSA

La prévention de l’incontinence anale après LOSA repose sur la prévention de la LOSA. La prévention débutée pendant la grossesse (massage périnéal, rééducation périnéale, apprentissage de la poussée, utilisation d’un ballon gonflable) ne serait pas utile. La prévention pendant l’accouchement (compresses chaudes et massages périnéaux ; l’utilisation d’une ventouse plutôt que les forceps) permettrait de limiter le risque de LOSA, ce qui implique une formation des professionnels de naissance. La place de l’épisiotomie n’est pas déterminée. La prise en charge immédiate de la LOSA nécessitant son diagnostic et sa réparation permettrait de réduire le risque d’incontinence anale.

Lorsque la patiente présente une incontinence anale après LOSA et que le périnée est bien réparé, la prise en charge n’est pas différenciée de l’incontinence anale sans antécédent de LOSA. Une régulation du transit et une rééducation anale par biofeedback sont les stratégies proposées. En cas d’échec, il peut être proposé un test de neuromodulation des racines sacrées. L’efficacité de la prise en charge de l’incontinence anale en cas de LOSA n’a pas été spécifiquement évaluée.

  • La prévention de l’incontinence anale après LOSA repose sur la prévention de la LOSA et la réparation immédiate
  • La prise en charge thérapeutique de l’incontinence anale après LOSA n’est pas différenciée de celle de l’incontinence anale sans antécédent de LOSA

La dyspareunie

Après LOSA, le risque de dyspareunie est augmenté dans le post-partum. La fonction sexuelle féminine dans sa globalité n’est pas altérée mais il persiste des dyspareunies et des troubles de la lubrification vaginale à long terme. Le rôle de la LOSA dans la dyspareunie à long terme est difficile à préciser en raison de facteurs multiples pouvant intervenir : l’âge, la ménopause, l’histoire médicale, obstétricale et chirurgicale, mais également des facteurs psychologiques, socioculturels et interrelationnels. Les modalités de prise en charge de la dyspareunie après LOSA ne sont pas définies spécifiquement. La rééducation pelvienne n’a pas montré son efficacité. Les stratégies thérapeutiques comportent des thérapies manuelles afin de relâcher la musculature du plancher pelvien, des traitements médicamenteux systémiques (Prégabaline, Amitriptyline) et locaux (gel de lidocaïne), ainsi qu’une prise en charge psychosexuelle, associant des approches éducatives, cognitivo-comportementales et corporelles, incluant au besoin le partenaire.

  • La dyspareunie est à rechercher de façon systématique après LOSA en tenant compte des facteurs potentiellement associés
  • La prise en charge de la dyspareunie après LOSA n’est pas spécifique

Les fistules rectovaginales

La fistule rectovaginale complique entre 1 et 2% des LOSA, selon les études. Les causes obstétricales représentent la cause la plus fréquent de fistule rectovaginale (entre 5 et 30%). La fistule est souvent localisée dans les 2/3 inférieurs du vagin. Les patients décrivent le passage de gaz et/ou de selles liquides dans le vagin, des écoulements purulents ou parfois des infections vaginales et urinaires récidivantes. Le diagnostic est parfois difficile à l’examen clinique et les données de l’imagerie ne permettent pas toujours de confirmer une suspicion diagnostic. Il est parfois nécessaire de réaliser un examen sous anesthésie générale avec test au bleu pour confirmer le diagnostic. Lorsque le diagnostic est posé, une prise en charge chirurgicale peut être proposée. En cas d’inflammation, il est prudent de repousser la chirurgie et en cas d’infection de traiter la suppuration. L’attente peut en effet parfois permettre la guérison des fistules rectovaginales simples. Si la fistule persiste, une chirurgie peut être proposée. La procédure la plus souvent décrite est l’intervention de Musset. Les résultats sont satisfaisants dans des séries ouvertes de petits effectifs. D’autres techniques peuvent être proposées utilisant une voie endorectale, endovaginale ou transpérinéale avec ou sans lambeau. La fermeture de l’orifice rectal est essentielle dans toutes les techniques. Une dérivation fécale transitoire peut être proposée.

  • Le diagnostic de fistule rectovaginale n’est pas toujours simple
  • L’attitude attentiste initiale est à privilégier
  • La prise en charge doit être réalisée par des praticiens expérimentés

Références

Van Brummen HJ, Bruinse HW, van de Pol G, Heintz AP, van der Vaart CH. Defecatory symptoms during and after the first pre- gnancy: prevalences and associated factors. Int Urogynecol J Pelvic Floor Dysfunct 2006;17:224—30.
Faltin DL, Otero M, Petignat P, et al. Women’s health 18 years after rupture of the anal sphincter during childbirth: I. Fecal incontinence. Am J Obstet Gynecol 2006;194:1255—9.

Prise en charge et conséquences des lésionsobstétricales du sphincter anal (LOSA) :mise au pointManagement and consequences of obstetrical anal sphincter injuries: ReviewP. Viannaya,b,1, F. de la Codrec,1, C. Brochard,T. Thuberte, G. Meurettec,f, G. Legendreg,A. Venara∗,

Macarthur C, Glazener C, Lancashire R, Herbison P, Wilson D, Grant A. Faecal incontinence and mode of first and subse-quent delivery: a six-year longitudinal study. BJOG Int J Obstet Gynaecol 2005;112:1075—82.

Jangö H, Langhoff-Roos J, Rosthøj S, Sakse A. Recurrent obstetric anal sphincter injury and the risk of long-term anal incontinence. Am J Obstet Gynecol 2017;216:610.e1-610.e8.