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Coccygodynies Chroniques

Doggy Bag

  1. Douleurs du coccyx ou attribuées au coccyx
  2. Se majorant en position assise (arrière), au relever de la position assise 
  3. Origine post traumatique fréquentes ( par ex post partum) même si traumatisme ancien 
  4. Examens complémentaires ( coccygodynies chroniques) IRM , radio simple
  5. Examens diagnostiques : clichés dynamiques, echographie dynamique et statique 
  6. Traitements
    1. Conseils de protection ( coussin, siège..)
    2. Traitements physiques (ostéopathie, kinésithérapie)
    3. Topiques (lidocaïne (hors amm) ; capsaïcine)
    4. Infiltrations 
    5. chirurgie

La première description d’une coccygodynie est faite en 1588, par le médecin flamand Henri de Smet (1537-1614), chez sa propre épouse à la suite d’un accident survenu en 1588. Longtemps ignorée ou du moins intéressant peu de monde, c’est JY MAIGNE (1) et Levon DOURSOUNIAN qui ont apporté le plus de contributions récentes à la compréhension et au traitement de ce syndrome.  

La coccygodynie est un syndrome assez simple à définir, il s’agit d’une douleur du coccyx majorée par la position assise et/ou au relever de cette dernière. Les choses sont comme nous allons le voir relativement plus complexes.

Anatomie, innervation et rapports 

Le coccyx est un mot grec qui signifie le bec d’un coucou, car la vue latérale du coccyx ressemble à la vue latérale du bec d’un coucou. Le terme singulier « coccyx » laisse entendre qu’il s’agit d’un seul os, il se compose en réalité de 3 à 5 corps vertébraux distincts, dont la soudure varie considérablement. 

Le coccyx est le reliquat de notre queue de primates qui a régressé au cours du temps. Sa taille, le nombre vertèbre coccygienne (de 1 à 5), sa forme (droit, en hameçon, .. ) sont variables et non systématiquement pathologiques per se .

Tout comme le reste du rachis, les vertèbres coccygiennes ont une innervation mixte : la zone dorsale et les téguments qui la recouvrent dans la partie crâniale du pli inter fessier sont innervés par des nerfs mixtes (nerfs de Trolard , branches sacrales caudales ) et la zone ventrale, véritable complexe disco-corporéal par le système végétatif médié par le ganglion IMPAR .

Les muscles suivants s’insèrent aux faces  latéro-antérieures du coccyx : levator ani, iliococcygeus, coccygeus, et pubococcygeus. Le grand fessier s’insère au niveau postérolatéral du coccyx. Les ligaments sacro-coccygiens antérieur et postérieur, des ligaments longitudinaux antérieur et postérieur, s’attachent également au coccyx. D’autres ligaments s’insèrent au coccyx : les ligaments sacro-tubérositaire et sacro-épineux. Par ailleurs, le coccyx est également relié au raphé ano-coccygien (qui s’étend de l’anus au coccyx distal, maintenant l’anus dans sa position au sein du plancher pelvien).

Pour finir la face antérieure du coccyx est en rapport direct avec le ganglion IMPAR (dernier ganglion de la chaîne sympathique paravertébrale et responsable de la sensibilité végétative du périné et de la motricité involontaire : sphincter interne) 

Etiologies

Les traumatismes verticaux directs, les microtraumatismes répétitifs et les accouchements sont des causes courantes de la douleur du coccyx. Cependant, des causes sous-jacentes plus graves doivent être exclues, telles que les infections (y compris l’abcès des tissus mous et l’ostéomyélite) ou les tumeurs malignes (y compris le chordome, qui a un taux de mortalité élevé).

La coccygodynie peut aussi être une douleur référée due à des troubles gastro-intestinaux ou urogénitaux inférieurs (cf. supra).

Les conséquences d’un traumatisme vertical direct au coccyx peuvent varier de la contusion à la fracture-dislocation du coccyx. Une atteinte traumatique ou non des ligaments coccygiens peut entraîner une instabilité dynamique du coccyx (mouvement excessif du coccyx lors de la mise en charge, en position assise). Une mobilité anormale du coccyx peut ou pas entraîner une douleur coccygienne. Les coccyx anormalement mobiles peuvent être soit hypermobiles (en raison de laxité des ligaments), soit hypomobiles (rigides). Le coccyx peut être subluxé antérieurement ou postérieurement, instable ou même luxé.

Clinique et définition (2,3)

Douleurs du coccyx se majorant en position assise ou au relever

Il s’agit donc de douleurs du coccyx mais il n’est pas précisé si ce sont des douleurs attribuées au coccyx par le patient ? par le médecin ?, situées sur le coccyx par le patient ? par le médecin ? ou référées au coccyx (4), ou projetées du coccyx.  Pour palier à cette incertitude Foye recommande de demander aux patients de pointer d’un doigt le site le plus douloureux, qui, chez les patients atteints de coccygodynie, sera bien plus caudal que les causes les plus courantes de lombalgie (situées en haut de la colonne lombo-sacrée), et plus médian que les syndromes douloureux des fesses (tels que la douleur sacro-iliaque et la douleur du piriforme).

La forme la plus simple reste une douleur située au niveau du coccyx, très positionnelles, mécaniques dans leur rythme, d’expression souvent relativement neuropathiques avec les items brûlures, décharges électriques au premier plan, pouvant être insomniantes en décubitus dorsal strict. 

Il convient d’emblée de rechercher des antécédents traumatiques même très anciens, y compris les accouchements traumatiques ou longs. 

Le caractère majorant du relever de la position assise, la majoration per défécatoire (si effort d’exonération) voire per coïtale, sont des éléments qui évoquent fortement la présence d’une hyper mobilité coccygienne. 

L’examen clinique peut retrouver l’existence d’une fossette du pli inter fessier (ce qui évoque la présence d’un spicule ou épine coccygienne), et surtout confirme l’allodynie au frottement ou à la pression du coccyx. 

L’examen intrarectal peut être utile voire indispensable pour évaluer le degré de mobilité du coccyx et déclenchant généralement la douleur usuelle lors de la manipulation du coccyx.

Au-delà de l’évaluation du coccyx lui-même, il est souvent utile de rechercher d’autres sources de douleur musculo-squelettique en effectuant un examen physique des articulations sacro-iliaques, des bourses ischiatiques et des muscles pelvi-trochantériens et de la charnière thoraco-lombaire.

Examens paracliniques

Les examens paracliniques sont indispensables au diagnostic et pour exclure une coccygodynie symptomatique d’une pathologie évolutive : Radio simple, IRM (5), et surtout radiologie dynamique de profil (assis debout) avec analyse des modifications. Cette approche est directement issue des travaux fondamentaux et novateurs de JY MAIGNE (6). 

De façon récente il faut noter la place importante que peut prendre l’échographie (données personnelles en cours de rédaction) dans l’analyse des coccygodynies. L’échographie statique permet de décrire l’anatomie du coccyx, sa forme, la présence éventuelle d’un spicule dont on peut au cours de l’examen déterminer le caractère douloureux ou pas. On finira l’examen avec une manœuvre dynamique (doigt intra rectal et mobilisation antéro postérieure du coccyx) afin de visualiser une hyper mobilité reproduisant la douleur usuelle du patient. Enfin l’échographie permet la réalisation d’infiltration souvent cortisolée, souvent avec radiofréquences pulsée.

Formes cliniques

Douleurs coccygoanales que l’on retrouve parfois dans certaines proctalgies fugaces, Coccygodynie et hypersensibilisation pelvienne

Diagnostiques différentiels

Les affections suivantes peuvent entraîner des douleurs dans la région du coccyx qu’il convient de différencier de la coccygodynie :

  • Névralgie pudendale à forme postérieure
  • Douleur ou inflammation de l’articulation sacro-iliaque
  • Kyste pilonidal avec abcès ou sinus
  • Sciatique
  • Hémorroïdes, lésions anales de tout type et retro rectales
  • Zona des fesses ou autres formes d’affections dermatologiques ( psoriasis..) 
  • Syndrome du piriforme, syndrome de MAIGNE de la charnière thoracolombaire
  • Tumeurs malignes , par exemple, chordome ou chondrosarcome.

Pronostic

Le pronostic des patients atteints de coccydynie est très variable avec parfois des conséquences psychosociales majeures. Alors que les symptômes de la plupart des patients s’améliorent ou disparaissent avec des soins conservateurs (non chirurgicaux), d’autres patients présentent une douleur au coccyx notoirement persistante, voire à vie. La gravité de la douleur et la gêne fonctionnelle (la capacité limitée à s’asseoir) peuvent être invalidantes. La coccygectomie présente un taux relativement élevé d’infection postopératoire, et même après l’ablation du coccyx, de nombreux patients présentent un certain degré de douleur persistante.

Traitement

La stratégie thérapeutique comprend : 

  1. la validation de la douleur, une prise en charge globale dont sociale, l’adaptation des activités (pas de vélo, pas d’équitation, pas de constipation, travail sur poste aménagé, ..) 
  2. une approche manuelle kinésithérapie éventuellement intra rectal(7) (solution discutée voire discutable) ou ostéopathique.
  3. Il existe sans doute une place pour les topiques (versatis *, qutenza *(8)) 
  4. En seconde ligne on pourra faire appel aux infiltrations (spicule, inter coccygienne mobile, Impar, hiatus sacrococcygien) avec ou sans corticoïdes , avec ou sans radiofréquence pulsée. 
  5. En troisième ligne la chirurgie peut être indiquée (coccygectomie totale et le plus souvent partielle), seulement en cas de bloc test positif (cf supra), avec d’excellents résultats au prix de risques infectieux non nuls (9,10). 

Références

  1. Maigne, J. Y., S. Guedj, et C. Straus. « Idiopathic Coccygodynia. Lateral Roentgenograms in the Sitting Position and Coccygeal Discography ». Spine 19, no 8 (15 avril 1994): 930-34. https://doi.org/10.1097/00007632-199404150-00011.
  2. Lirette, L. S., Chaiban, G., Tolba, R., & Eissa, H. (2014). Coccydynia: an overview of the anatomy, etiology, and treatment of coccyx pain. Ochsner Journal14(1), 84-87.
  3.  Foye PM. Coccydynia: Tailbone Pain. Phys Med Rehabil Clin N Am. 2017 Aug;28(3):539-549.
  4.  Patijn, J., Janssen, M., Hayek, S., Mekhail, N., Van Zundert, J., & Van Kleef, M. (2010). 14. Coccygodynia. Pain practice10(6), 554-559.
  5. Shams, A., Gamal, O., & Mesregah, M. K. (2021). Sacrococcygeal morphologic and morphometric risk factors for idiopathic coccydynia: a magnetic resonance imaging study. Global Spine Journal, 2192568221993791.
  6. Maigne JY, Tamalet B. Standardized radiologic protocol for the study of common coccygodynia and characteristics of the lesions observed in the sitting position. Clinical elements differentiating luxation, hypermobility, and normal mobility. Spine (Phila Pa 1976). 1996 Nov 15;21(22):2588-93. [PubMed: 8961446]
  7. Maigne, J.Y. Coccygodynie et thérapie manuelle. Lett Med Phys Readapt 27, 149 (2011).
  8. Levesque Amelie, Thibault Riant, Jean-Jacques Labat, et Stephane Ploteau. « Use of High-Concentration Capsaicin Patch for the Treatment of Pelvic Pain: Observational Study of 60 Inpatients ». Pain Physician 20, no 1 (février 2017): E161-67.
  9. Doursounian, L., Maigne, J. Y., Faure, F., & Chatellier, G. (2004). Coccygectomy for instability of the coccyx. International orthopaedics28(3), 176-179.
  10. Shalaby MM. The Surgical Role in the Management of Persistent Coccygodynia in Adolescent and Pediatric Patients: A Retrospective Case Series. HSS Journal®. 2022;18(1):110-115. doi:10.1177/1556331621991498

Ce dossier a été coordonné par les Dr Amélie SENEAU-LEVESQUE et Dr François PIGOT pour La Revue et Convergences PP.