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VISUCHIR ? Vous saurez ce que vous faites… Et les autres aussi !

VISUCHIR, un outil de data visualisation de nos pratiques chirurgicales

L’outil VISUCHIR ETABLISSEMENT a été initié en 2017 par la Caisse Nationale d’Assurance Maladie (CNAM) en lien avec l’Agence Technique de l’information sur l’Hospitalisation (ATIH) pour fournir en open data les volumes d’actes de la Classification Commune des Actes Médicaux (CCAM) avec la durée d’hospitalisation correspondante, par site chirurgical (plus de 100 actes/an), par région et au niveau national. VISUCHIR a été conçu initialement, pour accompagner et stimuler le développement de la chirurgie en ambulatoire. Dès sa première version, cet outil permettait des expériences de benchmarking pour réfléchir aux capacités de progression de la prise en charge ambulatoire, mais s’adressait plus à ce stade, aux directions administratives. Depuis 2019, le Dr Gilles Bontemps (CNAM) a proposé de créer VISUCHIR SPECIALITES en coopération avec les CNP et les sociétés savantes, dont la nôtre. L’objectif était de rendre VISUCHIR utile à l’évaluation de nos pratiques professionnelles. Notre participation, en tant que société savante, a consisté à donner de la lisibilité clinique en regroupant par spécialité les actes CCAM en superfamilles (exemple : « proctologie »), puis familles d’actes CCAM (exemples : « hémorroïdes », « fistules »), reflétant les actes réalisés au quotidien dans notre spécialité.
La version la plus récente de 2023 collige tous les actes CCAM (y compris ceux pratiqués en robotique) de 2019 à 2022 en précisant les volumes, les durées moyennes d’hospitalisation, les taux et potentiels d’ambulatoire, les comorbidités et les âges selon chaque spécialité. Le tableau de bord permet d’obtenir instantanément les courbes de progression et d’analyser ainsi aisément l’évolution de nos pratiques et de les comparer avec d’autres établissements, sans se noyer dans des tableurs Excel.

Depuis 2015, à la suite de l’élaboration des recommandations pour la chirurgie proctologique en ambulatoire, la progression sur 9 ans est spectaculaire, passant d’un taux brut à 32% en 2013 sur un volume total de 143.000 actes à 72% en 2022 pour un volume total d’actes de 114 686. (Versus un taux moyen français de 62.8% en 2022 toutes spécialités chirurgicales confondues)

Une évaluation de l’évolution de nos pratiques concernant la chirurgie hémorroïdaire (hors hémorroïdectomie mono-pédiculaire) entre 2019 et 2022, est présentée à partir de la mise à jour 2023 de VISUCHIR. (Figures 1 et 2) : ces tableaux correspondent aux volumes et au taux brut de prise en charge ambulatoire des hémorroïdectomies par résection sous muqueuse EGFA003, des hémorroïdectomies avec anoplastie EGFA002, des hémorroïdectomies semi-fermées ou fermées EGFA001, du Longo EGD001 et du Sullivan (plicature rectale antérieure) associé à une hémorroïdectomie HJFD005.

Figure 1 : Chirurgie hémorroïdaire en 2022 selon les actes CCAM
Figure 2 : Taux ambulatoire de la chirurgie hémorroïdaire entre 2019 et 2022 selon les actes CCAM

A la lecture des résultats, il est évident que l’hémorroïdectomie « ouverte » (EGFA003 + EGFA002) reste la plus pratiquée des interventions (15764 actes en 2022 avec une diminution de la fréquence du geste d’anoplastie associée) avec un taux en ambulatoire de 57%. Ce taux est perfectible mais nécessite un travail portant en particulier sur la prise en charge de la douleur post opératoire au retour des premières selles.
En 2018-2019, pour l’ensemble de la chirurgie hémorroïdaire, le taux de réhospitalisation entre J1et J3, estimé à 5%, a été mis en avant par le rapport de l’HAS comme étant le plus élevé parmi les actes chirurgicaux pratiqués en ambulatoire (taux moyen en chirurgie ambulatoire de 0.5%).

Ce travail a été complété par les résultats sur la même année des taux de ré-hospitalisation jusqu’à J+30 publiés dans la monographie de l’AFC 2021 (Frédéric de la Codre, Romain Guilé, Emilie duchalais, Valérie Bridoux, Guillaume Meurette : Hémorroïdectomies en France : Analyse des pratiques à partir de la base de données PMSI 2018-2019 in Guillaume Meurette & Valérie Bridoux. Chirurgie Proctologique. Monographie de l’Association Française de Chirurgie. 2021).
Pour l’ensemble de la chirurgie hémorroïdaire, le taux de réhospitalisation à J30 était de 6,8% sur les 41276 interventions de chirurgie hémorroïdaire colligées. La réhospitalisation survenait dans un délai de 7.9 +/- 7.6 jours, le plus souvent en rapport avec une hémorragie.

Hormis l’intervention de Longo dont le volume diminue mais la prise en charge en ambulatoire s’améliore, l’essor de la chirurgie hémorroïdaire « mini-invasive » se lit indirectement. En effet la nomenclature de la ligature Doppler guidée avec mucopexie (EDSD011), n’existe que depuis décembre 2021 et n’apparait donc que dans les données VISUCHIR 2022 (2582 actes dont 74,4% en ambulatoire) au niveau de l’onglet « toute la chirurgie » et non de l’onglet de la spécialité travaillé avec le CNP (d’où la nécessité de mettre à jour les listes d’actes travaillés à un temps T). De ce fait, cela pourrait expliquer l’excellent taux d’ambulatoire des 6031 actes codés HJFD005 qui correspondent probablement plus à des cures hémorroïdaires que de rectocèle. De même les 9840 actes codés EGFA001 (hémorroïdectomies fermées) correspondent aussi à des actes de ligature-mucopexies, et depuis 4 ans à des actes de thermofusion hémorroïdaire par radiofréquence, qui ont probablement des taux d’ambulatoire avoisinant les 80%, ce qui améliore « artificiellement » le taux d’ambulatoire de ces deux cotations (figure 3).

Figure 3 : Volumes de la chirurgie hémorroïdaire entre 2019 et 2022 selon les actes CCAM

Afin d’améliorer l’analyse de notre activité chirurgicale, il est donc nécessaire que s’accélèrent les procédures de reconnaissance par l’HAS et de valorisation par la CNAM, des chirurgies innovantes. Ceci se met en place depuis la création par la CNAM, de la commission HCN (Haute Commission à la Nomenclature). Cette commission travaille en collaboration avec les référents médico-chirurgicaux des sociétés savantes de chaque spécialité. L’objectif est une mise à jour au fil de l’eau des libellés des actes CCAM, l’introduction dans la nomenclature des actes innovants et la classification des actes avec une révision de leur hiérarchie.

La collaboration de la SNFCP avec VISUCHIR continue puisque nous avons été sollicités avec d’autres sociétés savantes et les CNP, pour identifier les taux de ré-hospitalisation (et non de complications) jusqu’à J+30. Ceci concernera les 4600 actes CCAM chirurgicaux et permettra d’améliorer nos prises en charge post-opératoires. Ces données nous mettent aussi à niveau pour des comparaisons internationales. On comprend également ainsi au travers de la complexité de ces analyses, le côté artificiel des classements proposés par les médias sur des données mal identifiées et mal interprétées.