Lundi 27 janvier 2025, jour de la Sainte Angèle, Marion, 33 ans, a un rapport sexuel anal, non protégé par préservatif, avec un partenaire fixe lui ayant présenté patte blanche (sérologie des IST négative, Chlamydiae compris).
Mardi 28 janvier, apparaissent des symptômes qu’elle connait bien d’infection urinaire basse ; elle est traitée quelques jours par fosfomycine, puis par 5 jours de cotrimoxazole.
Jeudi 6 février, elle présente de la fièvre dans la soirée.
Vendredi 7 février, s’installe un syndrome rectal franc : douleurs pelviennes, émissions glairo sanglantes, avec des diarrhées.
Samedi 8 février elle consulte aux urgences.
Un auto prélèvement anal est fait, à visée bactériologique ; sa NFS est normale, la CRP est modérément élevée à 15 mg/L. Elle regagne son domicile avec un rendez-vous pour une consultation en infectiologie 3 jours plus tard.
Mardi 11 février, l’infectiologue demande un avis proctologique devant ce syndrome rectal persistant, sans germe retrouvé ; en effet Chlamydiae et Gonocoque sont revenus négatifs.
L’examen clinique retrouve une patiente douloureuse, nauséeuse, à l’abdomen météorisé, apyrétique. La marge anale est normale, l’examen endo rectal par rectoscope rigide retrouve une rectite ulcérée remontant au-delà de la charnière recto sigmoïdienne ; les ulcérations sont en coup d’ongle, éparses, creusantes, multiples, la muqueuse d’intervalle est modérément érythémateuse.
De nouveaux prélèvements bactériologiques sont faits, ainsi que des biopsies multiples au niveau des ulcérations.
De nouveau, pas de germe retrouvé en bactériologie, l’histologie répond « discrète colite focalement ulcérée sans signe de spécificité. Pas d’argument pour une trépanomatose. Pas d’argument pour une MICI. »
La patiente devient fébrile, ses douleurs abdominales s’aggravent, elle est admise dans le service de gastro entérologie le mercredi 12 février.
Un contrôle biologique montre une leucocytose toujours normale, mais une CRP plus élevée à 44 mg/L. Un scanner abdominal révèle un épaississement inflammatoire de la partie basse du sigmoïde et du rectum avec densification de la graisse à sa périphérie (* cf imagerie) sans abcès, ni signe occlusif.
Enfin, des coprocultures sont réalisées, avec recherche de toxines du Clostridium difficile, qui reviendra positive, faisant poser le diagnostic de recto sigmoïdite à Clostridium.

Un traitement par Dificlir® (fidaxomicine) pour 10 j est instauré.
L’évolution clinique est rapidement favorable : après 5 jours de traitement la patiente n’a plus de fièvre, plus de syndrome rectal, plus d’émissions glairo sanglantes.
En conclusion, devant un tableau de rectite, même en cas de contexte évocateur, il ne faut pas omettre d’éliminer les causes infectieuses plus rares, autres que les infections sexuellement transmises. Ce cas clinique nous rappelle l’importance d’un interrogatoire presque policier pour parvenir à cela, avant de s’orienter vers une cause inflammatoire.
En effet, Clostridium difficile, cytomégalovirus, amibes, Campylobacter, Shigella, …, classiquement responsables de colite, peuvent donner des tableaux de rectite exclusive.
Une coproculture avec le cas échéant recherche de Clostridium difficile est à réaliser au moindre doute.