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Allez ! Botox pour tous ?

Injection of botulinum toxin significantly increases efficiency of fissurectomy in the treatment of chronic anal fissures.

Roelandt P, Coremans G, Wyndaele J.

Int J Colorectal Dis 2022;37:309-12.

Mots clés

Fissure, fissurectomie, toxine botulique

Appréciation

Cette étude belge est partie du principe que la fissurectomie était probablement moins efficace que la sphinctéromie latérale en raison de l’absence de correction de l’hypertonie sphinctérienne. Les auteurs ont donc voulu évaluer l’effet supplémentaire d’une injection de toxine botulique à la fissurectomie dans le traitement de fissures anales chroniques.

Ils ont ainsi fait l’analyse rétrospective monocentrique de 293 fissurectomies avec ou sans injection de toxine botulique, avec le soulagement de la douleur comme critère principal d’évaluation.

La fissurectomie seule a permis de soulager les douleurs dans 81,1 % des cas mais l’injection supplémentaire de toxine botulique a permis d’être plus efficace : douleurs soulagées dans 90,1 % des cas (p < 0,05). Le taux de complications postopératoires était identique entre les deux groupes, principalement l’incontinence aux gaz (4,5 vs 4,9 % avec la toxine botulique) et les saignements (1,8 vs 2,5 %).

Les auteurs en ont donc conclu que l’injection de toxine botulique augmentait significativement l’efficacité de la fissurectomie seule dans le traitement des fissures anales chroniques.

Commentaire :

Le traitement opératoire de la fissure anale, c’est un peu l’arlésienne ! Depuis 30 ans, deux positions se défendent avec deux stratégies qui s’opposent sans qu’à ce jour nous n’arrivions à une synthèse. Les uns, soucieux de ne pas entamer la réserve sphinctérienne, proposent une fissurectomie, éventuellement associée à une anoplastie muqueuse ; les autres, soucieux d’offrir au patient le meilleur taux de guérison, proposent avec moins d’hésitations une sphinctérotomie latérale.

Puisque ces deux visions s’affrontent en assumant chacune les avantages et inconvénients de leur approche, concevoir une étude randomisée parait aujourd’hui irréalisable et inutile. En revanche, une approche intelligente serait d’améliorer les résultats de la technique la moins performante.

Voici le raisonnement de l’équipe de Louvain qui a comparé un groupe de patients opérés d’une fissurectomie à un groupe auquel une injection de toxine botulinique A a été associée (en plus de la fissurectomie). Cette approche n’est pas récente, mais, malgré plusieurs publications émanant d’équipes expérimentées, elle n’est pas à ce jour un standard (1).

Ce manque d’enthousiasme est peut-être lié aux déceptions des études qui ont évalué la toxine botulinique seule dans la fissure anale (2). Pourtant, au cours des dernières années, la toxine botulique a progressivement montré son intérêt dans les pathologies urologiques (vessie hyperactive) et dans d’autres domaines de la pathologie proctologique (incontinence par urgences) (3). Or manifestement l’adjonction d’injection intrasphinctérienne de cette toxine améliore de façon significative les scores de douleurs des patients.

Certes l’article n’est pas d’une forte puissance méthodologique, mais l’effectif et le caractère standardisé de la prise en charge rend les résultats assez pertinents. Le moment est peut-être venu de revoir nos standards si nous voulons améliorer les résultats de la fissurectomie et tendre vers ceux de la sphinctérotomie sans les effets secondaires ! Il faudra au préalable bien harmoniser et évaluer les modalités d’injections (quadrants et doses non standardisées dans la littérature)…

De cet article, nous pouvons finalement retenir 2 messages : la fissurectomie reste une attitude prudente que l’on peut préconiser chez nos patients qui souffrent de fissure anale (80% d’efficacité) et l’injection de toxine botulinique potentialise les résultats.

Références :

  1. Lindsey I, Cunningham C, Jones OM, Francis C, Mortensen NJ. Fissurectomy-botulinum toxin: a novel sphincter-sparing procedure for medically resistant chronic anal fissure. Dis Colon Rectum 2004;47:1947-52.
  2. Jin JZ, Bhat S, Park B, Hardy MO, Unasa H, Mauiliu-Wallis M, Hill AG.  A systematic review and network meta-analysis comparing treatments for anal fissure. Surgery 2022 (en ligne).
  3. Richard N, Basile P, Gourcerol G. Botulinum toxin: endoscopic treatment in fecal incontinence after ileoanal anastomosis. Endoscopy 2021 (en ligne).