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Identification des structures pelviennes sur IRM périnéale : clés de repérage et de lecture

Diplôme inter-universitaire – Proctologie médicochirurgicale – Fiche numéro 2

Par Dr Marie-Lise Thierry, Dr Pedro Fernandez, Pr Laurent Abramowitz

Objectifs pédagogiques

  • Conditions de réalisation d’une IRM ;
  • Connaître les différentes séquences, leurs avantages et leurs inconvénients ;
  • Savoir identifier les structures sphinctériennes, pariétales et les espaces de diffusion ;
  • Connaître les indications de l’IRM périnéale en proctologie.

Indications en proctologie de l’IRM périnéale

  • Cartographier un trajet de fistule anale et vérifier l’absence de collection ou trajet non drainé
  • Examen de référence pour le bilan d’extension loco-régional du cancer épidermoïde de l’anus (Cf. Capsule Cancer de l’anus : sémiologie clinique et bilan thérapeutique)
  • Etudier les différents étages de la statique pelvienne en périnéologie (Cf. Capsule Défécographie et IRM dynamique : conditions d’examen et paramètres recueillis)
  • Douleurs pelvi-périnéales inexpliquées par l’examen clinique proctologique (Cf. Capsule Douleurs pelviennes chroniques : boîte à outils pour les déchiffrer et les soulager)

Protocole d’une IRM périnéale

Les plans axial et coronal sont alignés sur l’axe du canal anal et non du rectum.

La couverture anatomique doit comprendre une exploration de la marge anale au rectum en incluant l’étude des fosses ischio-anales et de l’espace supra-lévatorien afin de chercher des extensions du trajet principal.

Pour avoir une bonne résolution spatiale, des coupes fines de 3 mm sont utilisées (1).

Les séquences considérées comme obligatoires sont les séquences T2 (avec et sans suppression de graisse) en plan axial, coronal et sagittal et la séquence T1 avec injection de gadolinium (1).

La séquence de diffusion est utile dans un bilan de lésion tissulaire, suspecte de cancer de l’anus.

Structures anatomiques à identifier sur une IRM périnéale

La séquence IRM considérée comme étant anatomique est la séquence T2. En effet, il existe un contraste spontané entre les tissus graisseux en hypersignal et les tissus musculaires en hyposignal.

Séquence pondérée en T2 coupe coronale :

  • le faisceau ilio-coccygien (en jaune) avec une forme en aille de mouette : sépare l’espace supra- lévatorien et infra-lévatorien
  • les fosses ischio-anales (en rose)
  • la sangle pubo-rectale (en vert)
  • le sphincter externe (en bleu)
Figure : Séquence pondérée en T2 coupe coronale

Séquence pondérée en T2 coupe axiale : à la partie haute du canal anal

  • la sangle pubo-rectale (en vert) en forme de U ouvert en antérieure, cravate le rectum à la hauteur de la jonction ano-rectale
  • le sphincter externe (en bleu)
Figure : Séquence pondérée en T2 coupe axiale

Séquence pondérée en T2 coupe axiale : à la partie moyenne et basse du canal anal

  • Le sphincter interne (flèche 1) : muscle lisse qui correspond au prolongement de la couche musculaire circulaire du rectum. Il apparaît en hypersignal T2 relatif.
    Le sphincter interne (flèche 1) se rehausse fortement après injection (Axial T1 gado) à la différence du sphincter externe.
  • Le sphincter externe (flèche 2) : muscle strié, circulaire qui apparaît en hyposignal T2. Son signal est comparable à celui des muscles striés pelviens.
  • L’espace intersphinctérien (flèche 3) : à contenu graisseux est visible au mieux en IRM à la partie basse du canal anal. Son volume varie en fonction de la trophicité sphinctérienne.

Rappel : La ligne pectinée n’est pas visible en IRM. La hauteur de l’orifice interne dans le canal anal est mesurée en millimètres entre la marge anale et l’orifice interne par le radiologue. Il existe donc une variation interindividuelle de la longueur du canal anal. L’orifice interne est décrit en pratique comme étant bas, moyen ou haut dans le canal anal.

Grille de lecture de l’IRM périnéale dans les fistules anales

Séquence IRMApports de la séquence
Séquence T2 sans saturation du signal de la graisse dans les 3 plansSéquence anatomique : liquide en hypersignal intense, graisse en hypersignal, muscle en hyposignal Localisation du trajet fistuleux principal avec son orifice interne et les trajets secondaires Détection des trajets fibreux (hyposignal)
Séquence T2 avec saturation du signal de la graisse (T2 fat sat)Meilleure détection des lésions suppuratives (contraste blanc-noir)
Séquence T1 avec injection de gadoliniumDifférencier une collection, d’un abcès et un tissu inflammatoire de granulation Degré d’activité d’un trajet fistuleux

Sémiologie d’une suppuration en IRM périnéale

Nature tissulaireSéquence T2Séquence T1 avec injection de gadolinium
AbcèsHypersignalCollection en hyposignal T1 avec rehaussement de la paroi lors de l’injection
Trajet fistuleux purulentHypersignalRehaussement pariétal exclusif avec contenu en hyposignal
Trajet fistuleux avec tissu granulaireHypersignalRehaussement total : pariétal et luminal
Trajet fistuleux fibreuxHyposignalPeu ou pas de rehaussement

Quand prescrire une IRM périnéale pour explorer une fistule anale ?

Le diagnostic de fistule anale est clinique. La majorité des fistules anales ont un trajet transphinctérien inférieur. L’IRM périnéale n’est donc pas nécessaire pour aider à cartographier le trajet fistuleux.

Indications de l’IRM périnéale pour exploration d’une fistule analeApports de l’IRM
Fistule anale récidivante après un 1er traitement chirurgicalRecherche de diverticule, localisation de l’orifice interne et hauteur du trajet fistuleux
Bilan initial d’une fistule anale complexe (plusieurs orifices externes, plusieurs orifices internes, cordon fistuleux non palpé en consultation faisant suspecter une fistule haute, palpation d’une induration intersphinctérienne ou sous le releveur au toucher rectal)Localisation du trajet fistuleux, présence de trajets secondaires/ diverticule, présence d’abcès
Persistance de douleurs ou d’un orifice externe inflammatoire après drainage d’une fistule analeRecherche de trajet non drainé ou diverticule
Vérifier l’absence de trajet fistuleux non drainé avant de réaliser une technique d’épargne notamment dans la Maladie de Crohn ano-périnéaleOptimiser la réussite de la technique d’épargne
Vérifier la cicatrisation en profondeur après une technique d’épargne sphinctérienneCicatrisation radiologique : hyposignal T2 avec un très faible ou absence de rehaussement en T1 gadolinium Prédictif de la persistance de la cicatrisation à long terme de la fistule anale
Doute diagnostique entre une fistule anale et une suppuration extra- sphinctérienne comme le sinus pilonidal ou la maladie de VerneuilConfirmation du diagnostic

IRM périnéale : l’imagerie clé dans le cancer de l’anus (2,3)

L’IRM périnéale est l’examen de référence pour le bilan d’extension loco-régional du cancer de l’anus. L’IRM est d’intérêt limité pour les lésions superficielles de petite taille (<1 cm) en raison de son champ de vue large et inférieure à l’écho-endoscopie.

Le champ de l’IRM couvre les régions inguinales, la région pelvienne et le haut du mésorectum (niveau L5) jusqu‘à la marge anale et permet ainsi l’évaluation des tumeurs de la marge anale et du canal anal.

L’IRM évalue l’extension au sphincter interne, externe, au muscle releveur de l’anus et aux organes adjacents comme le vagin, la prostate, l’urètre ou la paroi de la vessie. L’extension à un organe adjacent classe la tumeur en T4.

Pour l’atteinte ganglionnaire, les ganglions inguinaux sont fréquemment hypertrophiés qu’ils soient bénins ou malins. L’évaluation de l’atteinte ganglionnaire régionale en IRM et PET TDM permet le plus souvent de déterminer la malignité des ganglions.

La période optimale d’évaluation de la réponse tumorale après radio-chimiothérapie est à 26 semaines du traitement. L’évaluation de la réponse tumorale est clinique et IRM en comparant l’imagerie pré et post traitement.

Douleurs anales non expliquées par l’examen clinique : utilité de l’IRM périnéale

En post opératoire, lorsqu’il persiste des douleurs anales à distance d’une chirurgie proctologique, l’examen clinique peut être mis en défaut par les remaniements fibreux. L’IRM est alors utile pour identifier une suppuration post opératoire.

Bibliographie

  1. Halligan S, Tolan D, Amitai MM, et al. ESGAR consensus statement on the imaging of fistula-in-ano and other causes of anal sepsis. Eur Radiol 2020 ; 30 : 4734-40
  2. Rao S, Guren MG, Khan K, et al. ESMO Guidelines Committee Anal cancer: ESMO Clinical Practice Guidelines for diagnosis, treatment and follow-up. Ann Oncol. 2021 Sep; 32 :1087-1100.
  3. Moureau-Zabotto L, Vendrely V, Abramowitz L, et al. « Cancer du canal anal ». Thésaurus National de Cancérologie Digestive, octobre 2022, en ligne [http://www.tncd.org]